Je suis aidante à plein temps de mon compagnon
depuis 2 ans. J’ai arrêté de travailler pour m’occuper de lui, puisqu’il est
totalement dépendant pour tous les actes du quotidien depuis son
encéphalopathie en septembre 2011. A ce moment-là, tout comme monsieur Jourdain
qui faisait de la prose sans le savoir, je ne savais pas que j’étais aidante.
J’étais juste la compagne de Mr X, lourdement handicapé et qui avait besoin
d’assistance. Aucun médecin, aucun soignant ni aucun de tous les acteurs
sociaux que j’ai pu croiser durant tout mon parcours ne m’a dit que j’étais
aidante. Tout ce que j’avais pu lire, voir et entendre s’orientait généralement
vers le proche dépendant mais pas vers son aidant. Personne ne m’a jamais dit
que ma santé physique et mentale risquait de s’altérer du fait de mon rôle
auprès de mon compagnon. Personne ne m’a jamais orienté vers des groupes de
parole ou des forums d’aidants, d’ailleurs personne ne parle des aidants, à la
radio ou à la télé. En surfant sur internet, je n’ai rien trouvé de concret
comme conseils aux aidants, à part l’évidente nécessité de me faire seconder et
de faire appel à des professionnels. Puis au hasard de mes pérégrinations
numériques, j’ai atterri sur un forum d’échanges entre aidants et j’ai
découvert que je n’étais pas seule, et même que nous étions 9
millions !!!!! 9 millions d’aidants qui soutiennent 9 millions de
personnes au quotidien.
Bien que toutes nos situations soient différentes,
nous avons toutefois un point commun : celui de souffrir de notre invisibilité.
Serge Guérin l’a très bien écrit, "Plus que d'un statut ou d'argent, les aidants ont besoin avant tout de reconnaissance".
Depuis 2010, dans la louable intention de mieux nous
faire connaitre et reconnaître de tous, le précédent gouvernement a créé le 6
octobre « La Journée des Aidants ». Cette journée était supposée être
la nôtre, une journée où la solidarité nationale s’exprimerait en notre faveur,
à nous qui donnons beaucoup et recevons si peu. Au fil des années, cette date
est tombée aux oubliettes. Pourquoi ? En dehors de tout débat politique,
peut-être que les aidants que leur rôle tient confinés à domicile, n’arrivent
pas à se faire entendre collectivement. Les associations supposées les y aider,
en leur assignant « leur juste place » n’y
arrivent pas plus. Tout juste arrivent-elles à organiser dans quelques
grandes villes de France quelques évenements locaux, avec tables rondes, débats
et ateliers de paroles. Mais qui va s’y rendre ? Les aidants (enfin ceux
qui peuvent sortir) et quelques acteurs sociaux que leur travail met en relation
avec eux. Mais pour NOUS, le 6 octobre, notre journée, sera une journée comme
les autres. Parce que la maladie ne prend pas de répit, elle. Le 6 octobre, il
nous faudra quand même lever, laver, habiller, changer et nourrir nos proches.
Hasard du calendrier, le 6 octobre cette année tombe
un dimanche. Alors, MOI, vous savez ce qui me ferait plaisir ? C’est qu’un
de nos proches, famille ou ami, prenne ma place rien que quelques heures. Et
puis tant qu’on y est, une immense campagne de communication, avec force
encarts dans la presse, spots de télévision, affiches et qui dirait :
« Vous, oui, vous là, vous avez surement dans
votre entourage quelqu’un qui aide, soutient et assiste au quotidien, un père,
une mère, un enfant, un(e) conjoint(e) ? Le 6 octobre, c’est l’occasion de
leur montrer que vous pensez vraiment à eux. Remplacez les une journée ou
quelques heures et permettez leur, ce jour-là d’oublier leur quotidien »
Voilà, moi aidante au quotidien assignée à résidence
par amour, j’aimerais bien que ce jour-là, une main providentielle se tende
vers moi. J’irais au cinéma ou profiter des derniers rayons du soleil, j’irais
où je voudrais parce que ce serait MA journée.
Et vous, vous faites quoi le 6 octobre
prochain ?
Et cette année, on entendra parler du 6 Octobre, à part entre aidants? Je l'espère.
RépondreSupprimerDoune